Le ski de randonnée, c'est de la randonnée ... à ski !
Le skieur de randonnée évolue en pleine montagne, à l’écart des stations de ski, et donc forcément « hors-piste ». La neige modifie sensiblement la progression par rapport aux itinéraires parcourus par le randonneur à pied, elle rend le terrain vierge après chaque nouvelle chute : les balises et le tracé du sentier sont masqués, les traces précédentes effacées, il faut « faire la trace » d’une façon judicieuse par rapport au modelé du terrain et au risque d’avalanches, à la montée comme à la descente. Mais elle donne un plaisir sans pareil à la descente, alors que l’été, cette descente peut être fastidieuse et même éprouvante.
Des équipements spécifiques pour pratiquer en sécurité
Le skieur de randonnée utilise des équipements spécifiques : à la montée, il colle des « peaux de phoque » (synthétiques aujourd’hui !) sous les skis pour empêcher le recul et il utilise des fixations articulées autour d’un axe, qui permettent de libérer le talon de la chaussure. Quand la neige est trop dure pour que les peaux adhèrent suffisamment, il fixe des « couteaux » à cheval sur le ski, sous la chaussure : les bords crantés métalliques assureront l’ancrage nécessaire.
À la descente, il enlève les peaux et bloque le talon pour retrouver les caractéristiques d’un ski alpin classique. La chaussure a aussi une position « montée » qui laisse la tige bouger librement, et une position « descente » qui bloque la tige en position un peu inclinée vers l’avant. La chaussure se compose d’une coque réglable et d’un chausson isolant amovible, qu’on enlève pour le faire sécher correctement ou marcher à l’intérieur des refuges.
Quand le skieur de randonnée évolue sur un terrain glaciaire ou emprunte un itinéraire plus raide (au-delà de 35°) ou étroit (les « couloirs », plus ou moins rectilignes et encaissés), ce qui peut l’amener à progresser skis fixés sur le sac avec des crampons et un piolet, ou à s’encorder, il devient un skieur-alpiniste.
Une bonne condition physique pour évoluer en montagne hivernale
Comme tout sport d’endurance, la pratique du ski de randonnée nécessite une bonne condition physique pour la montée. Pour la descente, un niveau minimum en ski alpin est requis : le dérapage, la trace directe et un stem maîtrisé dans tout type de neige sont les techniques de base indispensables.
Si en ski de piste, on évolue sur des surfaces soigneusement entretenues, lisses et homogènes, le skieur de randonnée évolue dans un milieu non préparé, aléatoire et changeant.
La neige n’est pas damée : idéalement, elle pourra être poudreuse, mais seulement après une chute de neige récente ou sur un versant toujours à l’ombre ; ailleurs, elle aura plus ou moins « transformé » et pourra être gelée, croûtée, cartonnée, ramollie.
Elle pourra être très différente dans la même journée selon que le versant est exposé au nord ou au sud, ou en fonction de l’altitude. Il faut savoir jouer avec le relief naturel et ces conditions de neige changeantes pour rendre la trace la plus agréable et la plus sûre possible.
En effet, le skieur de randonnée évolue dans un milieu non sécurisé. Les risques encourus sont bien réels pour celui qui ne connait pas la montagne hivernale.
Fonctionnement d’une sortie de ski de randonnée
L’encadrant qui propose la sortie s’occupe des inscriptions et de l’organisation pratique : covoiturage, réservation des hébergements, calcul des frais pour chaque participant… Il se réserve le droit de définir le nombre de participants maximal, et de valider les demandes d’inscription en fonction du niveau des participants et des exigences de la course, qu’il aura présentée sous forme de « fiche topo » normalisée : itinéraire, localisation, niveau de difficulté, durée estimée, dénivelé en montée/descente, difficultés particulières, matériel individuel et collectif à prévoir.
L’encadrant doit aussi faire une préparation méthodique pour réunir toutes les informations utiles avant la course, et les interpréter : détails de l’itinéraire envisagé, cartographie, prévisions météorologiques et nivologiques, récits de courses laissés sur les sites collaboratifs… Il s’appuie sur les « topos » où les itinéraires sont classés selon leurs difficultés et décrits de façon normalisée (voir ci-dessous « Cotations »). L’observation attentive du terrain pendant la course lui permettra d’actualiser ces informations, d’adapter ses décisions, et de donner des consignes aux participants qui seront adaptées au bon déroulement de la sortie et à la sécurité du groupe.
Cotation des courses à ski de randonnée
Le système de cotation utilisé au club est le système spécifique au Ski de randonnée ; la difficulté est notée de 1 à 5 avec 3 subdivisions à chaque fois (3.1, 3.2 et 3.3 par exemple pour le niveau 3), sauf pour le niveau 5 qui est ouvert vers le haut. Les niveaux 4 et 5 ne concernent ordinairement pas les sorties collectives, les pentes sont trop raides et les dangers objectifs trop présents pour y engager des groupes.
- Niveau 1 : c’est celui de l’initiation, et de courses qu’il est possible d’aborder par mauvaises conditions. Les pentes n’excèdent pas 30°, les passages ne sont pas trop étroits même en forêt, l’exposition n’est pas importante, le dénivelé ne dépasse pas 800 m et en général, le risque d’avalanche est faible.
- Niveau 2 : peu de difficultés techniques, pas de pentes raides (35° au maximum), mais le dénivelé comme l’exposition à la chute ou le danger objectif peuvent être importants.
- Niveau 3 : c’est l’entrée dans le ski-alpinisme, avec des passages techniques, des pentes longues à 35°, des passages courts jusqu’à 40°- 45°, la possibilité de forêts assez denses, ou de chemins forestiers raides.
NB : ces cotations sont établies pour une qualité de neige ferme, c’est-à-dire soit de la neige de printemps « transformée », soit de la neige froide de type « grains fins ». Mais sur les pentes faibles, la neige poudreuse et surtout la neige croûtée rendent le ski plus difficile. Sur les pentes fortes ou les terrains accidentés comme les forêts denses, les neiges profondes diminuent la difficulté, et les neiges dures l’augmentent sensiblement.
Cotations... et engagement !
Il existe une autre cotation relative à l’Engagement, c’est-à-dire à l’exposition à une chute plus ou moins grave sur l’itinéraire. Intuitivement, l’exposition est liée à la raideur des pentes et donc au niveau de la difficulté à ski, mais pas seulement : elle est aussi très liée à la présence d’obstacles et à l’état de la neige, et une course même facile peut exposer à un saut de barre rocheuse en cas de glissade sur neige dure à 30°. Cette cotation est notée de E1 à E4.
Il existe une cotation Marche, qui est celle utilisée pour les courses de neige réalisées à pied en technique alpine, avec une correspondance avec les courses à ski pour la montée. Elle est notée R (randonnée : niveaux 1.1 à 2.2), F (facile : niveaux 2.1 sur glacier à 3.2), PD (peu difficile : niveaux 3.3 à 4.2), AD (assez difficile), D (difficile) et TD (très difficile).
Les topos de la collection de référence Toponeige Volopress donnent ces 3 cotations pour chaque course.
► Plus de précisions
Enfin, une autre cotation utilisant les mêmes lettres que la cotation Marche mais d’un niveau décalé vers le bas, est utilisée dans d’autres collections de topos, comme les guides Olizane (F, PD, AD, D, TD, ED, avec chacune une subdivision + et -). Notant globalement la course, elle renseigne sur le sérieux, l’engagement et l’exposition.
Quelques exemples de courses avec les 3 cotations Ski/Engagement/Marche
Col du Sabot, versant sud-ouest (Grandes Rousses). Ski : 1.2/E1/R. Au-dessus de Vaujany, des pentes douces déboisées mènent au col en 800 m de dénivelé.
Petit Arc, versant sud-est (Lauzière). Ski 2.2/E1/R. Au départ de Tioulevé, cette course est une étape avant le Grand Arc, plus long et plus raide.
Côte-Belle, face ouest (Grandes Rousses). Ski 3.2/E1/F. Dominant le facile col du Sabot, la face ouest de Côte-Belle et ses 35° sont à pratiquer par conditions sûres (plaques fréquentes en neige froide).
Pelvas, couloirs sud (Queyras). Ski 4.3/E3/PD+ pour le couloir de droite et 5.1/E3/AD- pour le couloir de gauche. Des pentes déjà raides et surtout exposées au-dessus de barres rocheuses importantes.
Les Courtes, pente nord-est (Mont-Blanc). Ski 5.2/E2/AD. Une grande classique de la pente raide, longue (800 m si on part du sommet) et à 45° de moyenne. Elle a tendance à se creuser avec le retrait glaciaire.
La sécurité
Si la sécurité est définie comme le fait d’évoluer sans se mettre en danger et dans un horaire correct, on comprend qu’elle est liée à de multiples facteurs : le terrain, l’état des participants, les conditions de neige, les conditions météorologiques (froid, vent, brouillard). Elle dépendra des actions que réalisent les encadrants et les participants pour s’informer, se former et se préparer avant la course, pour se comporter et s’adapter pendant la course.
De mauvaises conditions nivo-météo peuvent conduire à l’annulation, au report ou à la modification d’une sortie, toutes décisions qui reviennent à l’encadrant. Un niveau de risque localement égal à 4 dans le bulletin d’estimation du risque d’avalanche (le BERA) de Météo France entraine généralement l’annulation de la sortie.
La sécurité passe aussi par le choix d’équipements adaptés au contexte :
- Le trio DVA (Détecteur de Victime d’Avalanche), pelle, sonde, appelé aussi pack de sécurité, est obligatoire quelles que soient les conditions et la difficulté de la course
- Les couteaux peuvent être considérés comme obligatoires, une glissade sur neige dure pouvant être dangereuse même dans une course facile, et la dureté de la neige étant très difficile à prévoir avec certitude
- Le casque est obligatoire pour les mineurs et fortement recommandé pour les majeurs
- Des crampons légers, un piolet seront demandés quand la course le nécessite
- En terrain glaciaire, baudrier, mousquetons avec broche à glace et autobloquant, et une longe sont obligatoires.
Il importe tout autant de savoir se servir du matériel :
- des exercices de prise en main du DVA sont proposés chaque année par le club en début de saison, et peuvent être repris par les encadrants à leur discrétion pendant les sorties. Il est demandé d’y participer avec énergie et bonne humeur ! On rappelle que les chances statistiques de survie d’une personne ensevelie sous une avalanche diminuent de 50% au bout de 18 minutes ! N’attendez pas d’être en équilibre sur vos carres pour savoir comment fixer les couteaux sur les skis !
Le matériel de ski de randonnée
- Skis de randonnée (avec fixations adaptées, réglées en fonction de votre poids et de votre niveau de ski)
- Paire de bâtons, entiers ou téléscopiques
- Paire de peaux de phoque autocollantes
- Chaussures de ski de randonnée
- Paire de couteaux adaptés aux fixations des skis
- Sac à dos (30 l en moyenne), être attentif au poids qui est votre meilleur ennemi !
- Sac poubelle de 30 l (s’il est prévu des précipitations)
- Couverture de survie
- Quelques pansements pour ampoules si on y est sujet
- Le pique-nique pour midi (avec un couteau) et des en-cas : fruits secs, barres de céréales, chocolat…à mettre dans une poche facile d’accès
- Boisson froide et/ou chaude, de 1 à 2 litres selon vos besoins et la saison
- Équipement pour se protéger du froid : veste coupe-vent, polaire, sous-pull thermique, bonnet, gants (2 paires, fine pour la montée, chaude pour la descente et les pauses) et éventuellement doudoune ou gilet en duvet,
- Équipement pour se protéger de la chaleur et du soleil : casquette ou bonnet, lunettes de soleil, crème solaire
- Masque selon la météo (neige, brouillard)
- Facultativement : un sifflet ; des chaussures/chaussettes de rechange pour le retour en voiture ; du scotch double-face pour les peaux de phoque (en cas de décollage intempestif) ; un petit bloc de fart (en cas de bottage des peaux)
- Frontale
- Licence CAF, papiers d’identité, carte Vitale, un ou plusieurs chèques, argent liquide
- Chaussons pour le gîte (pas pour le refuge, ordinairement)
- Pharmacie personnelle (antalgiques, antiinflammatoires, antispasmodiques, Biafine…)
- Drap-sac, linge de rechange et nécessaire de toilettes.
Voila. Maintenant vous savez tout pour participer à des randonnées à ski avec nous. En rentrant chez vous, n’oubliez pas de partager vos impressions, vos coups de cœurs ou les difficultés que vous avez rencontrées dans le blog associé à ce site.
Pour ce faire, il vous suffit d’envoyer un petit texte même tout simple au format Word assorti de quelques photos (légendées s’il vous plait) sur notre adresse mail : info@caflyonouest.fr, à l’attention de Philippe Métral qui en assurera la publication.
Vos impressions, vos commentaires c’est la vie du club. Un grand merci d’avance !